Résilience Equestre Holistique
Ce matin, je fais les soins et me revient en tête une image observée il y a peu de temps, ravivée par la rencontre d’un nouveau couple hier.
Je suis interpellée par une communication « ne passant que » par le licol, la longe, la main.
D ’ abord je me surprend à me demander pourquoi cela m’interpelle.
Tout d’abord, parce que j’ai vite abandonné cette « stratégie » avec Arriado car ayant une nuque et une avant main très forte et des postérieurs peu actifs, chaque traction vers l’avant de la longe entraînait systématiquement une résistance double de sa nuque ( résistance sur le licol, que je créais, avec un a-coup en arrière de sa part en plus) et un départ au pas lourd, démarrant des antérieurs. Et le temps ni changeait rien. Alors rapidement, j’ai appris à m’adresser à ses postérieurs ( pour finalement m’adresser à autre chose, mais pas de spoiler ! ).
Alors je m’abstiens d’utiliser ce mode de communication de manière globale ( j’utilise le licol comme objet de responsabilisation du cheval, une limite qu’il rencontre et qu’il à le choix de respecter en enlevant lui-même la pression) .
Je le transmets aussi aux cavaliers avec qui je travaille, et j’observe que malgré cela, l’utilisation de la main est systématique, surtout avec, soit un jeune cheval, soit un « jeune » cavalier, en somme, avec le manque d’expérience.
C’est cela qui m’interpelle. Alors j’en arrive à faire le lien avec notre condition de bipède, cette main si intelligente, si habile, si fine est aussi notre moyen de nous sentir en sécurité en s’agrippant, s’accrochant, se tenant, comme en tirant, et en portant. Notre main est instinctive, inconsciente, réflexe. Et pourtant, elle n’amène pas la sécurité avec nos chevaux !
Chevaux qui embarque, qui résiste, qui fuit pour un brin d’herbe, pour une montée d’émotions, pour une incompréhension et bien plus encore.
Alors nous focalisons un peu plus dessus, en crescendo jusqu’à ne plus avoir de porte de sortie parfois. On fait drapeau au bout de la longe, ou bien on se prend un coup de pied furtif, on subit le mouvement du cheval car notre main réflexe n’a pas beaucoup d’autres options finalement et s’aperçoit qu’elle ne fait pas le poids fasse à la détermination d’un cheval de 500 kg. Et ce corps qui suit cette fichue main !!!! Ben oui, il y a un corps au bout de cette main, et elle aura presque réussi à nous le faire oublier.
Et oui, si nous, nous maîtrisons avec habileté notre main, le cheval, lui, maîtrise avec habileté le langage du corps ! Et le corps lui ne ment pas, et c’est lui qu’écoute nos chevaux, que l’on soit à pied ou à cheval.
Nous devons chaque instant nous rappeler que le cheval est un « bouquet de sensation » ( Jean Claude Barrey). Qu’est ce qui attire ou repousse un cheval dans son troupeau, dans son environnement, dans la détermination d’un danger potentiel ? La place du dit objet dans l’espace et sa posture. Un individu du troupeau peut autant être un camarade de grooming qu’un prioritaire face à une ressource. Qu’est ce qui change dans la lecture de la situation ? pas les mots, pas le contrôle des postérieurs, des antérieurs ou de la tête, pas un stick, une posture intérieure, une posture extérieure et une place dans l’espace ! Elle est là la clé.
Quand nos gestes sont alignés avec notre posture, avec notre place par rapport au cheval et avec nos intentions et nos limites, le cheval répond avec une légèreté déconcertante ( pour certain 😉 ). Je ne dis pas que j’invente quelque chose, loin de là, je mets du sens, pour moi, dans différentes observations, différents ressentis pris ici et là et qui se rejoignent ici.
Comment font ces Klaus Ferdinand Hempfling, ces Frédéric et Jean-François Pignon, ces écuyers sans attirails coercitifs, ces maîtres d’arts martiaux ? Ils écoutent et apprennent le langage du corps, de la posture, et de la juste place dans l’espace. Enfin, il me semble.
Mais, cela m’a amené à me poser une autre question. Pourquoi Scarento et Arriado montrent plus de stabilité lorsque je leur offre un contact constant et égal sur les rênes En sachant que ces deux chevaux ont des morphologies totalement opposées, entre souplesse excessive et tonus musculaire très élevé, entre excellent équilibre pour l’un et démarche déguingandée pour l’autre, entre un profil longiligne et un profil plus compact, tout les sépare. Mentalement aussi d’ailleurs.
Alors je m’interroge sur le lien qu’entretient la tête du cheval avec sa colonne vertébrale. Tous les deux gagnent en stabilité, en contenance avec ce contact, bien qu’il ne s’agisse pas d’appui. Je ne creuserai pas ici ce sujet, mais il vient nourrir ma première question quand il me rappelle que manipuler la tête du cheval n’est pas anodin. Elle est, avec l’encolure biensûr, un important outil d’équilibre dans le corps du cheval, un fort balancier essentiel à la proprioception du cheval, nous avons alors tout intérêt à la leur « lâcher » ! Soyons conscients que la manipulation du licol, bien qu’ ancestrale, très utile et probablement inévitable pour de nombreuses pratiques, ne constituent pas le moyen de communication à privilégier mais plutôt un passage obligé dont on doit s’exercer à sortir le plus tôt possible. Pourquoi ? Parce qu’elle vous empêche d’établir une vraie communication claire, stable et sécurisante à mon goût, et qu’elle fait également focaliser votre cheval dessus, par la sensation physique ressentie, ce qui tend à la faire passer plus pour une gêne que pour un moyen de communiquer. Le cheval a besoin de sa tête pour se mobiliser et pour percevoir son environnement, y compris nous.
Et rappelons que le cheval ne s’arrête pas, n’avance pas, ne tourne pas mécaniquement avec sa tête ! Il s’équilibre et se mobilise par son centre de gravité, son attention portée sur un objet ou une direction prise, il répond à des sensations, internes comme externes, et surtout, un cheval ne se résume pas à sa tête !
La routine du quotidien, nous le savons tous, nous plonge plus dans le mental que dans notre corps, dans la focalisation plus que dans la globalité. Je vous invite, si cela résonne pour vous, à vous pencher sur ce que vous dit votre corps pour mieux comprendre ce qu’ « entends » votre cheval ( et tout votre entourage en réalité ).
Je vous partage quelques lectures qui m’ont permis d’en savoir plus sur le sujet, mais elle n’est pas du tout exhaustive :
-« Les 5 blessures qui empêchent d’être soi-même » Lise bourbeau : un livre passionnant pour comprendre ce qu’exprime votre morphologie.
-« Le grand dictionnaire des malaises et des maladies » Jacques Martel
-« Le langage émotionnel du corps. L’approche somato-émotionnelle, chemin de libération » Roger Fiammeti
Mais les chevaux sont les meilleurs interlocuteurs pour cela, et il y a pléthore de praticiens qui peuvent vous éclairer aussi là-dessus ( Technique Alexander par exemple ) et des enseignants tout disposés à vous accompagner sur ce chemin.
Belle danse à vous et à vos chevaux.